La place de la posture dans la pratique du ski alpin

Magazine Entraineur du ski alpin – hors série juin 2017
Par Frédéric Brigaud – Extrait

La fonction posturale, un thème extrêmement vaste que l’on peut aborder de mille et une façons. Dès lors, je vous propose cet axe de réflexion : Est-ce qu’un défaut de posture impacte plus fortement le corps que l’on pratique le ski alpin ou la course à pied ?

La posture, un système complexe mais évolutif

Comment vous tenez-vous pour lire cet article ? Comment s’organise les différents segments qui composent votre corps ? Si vous êtes assis, comment se répartit la pression sous vos fesses ? Où se localise la pression dans votre dos ? Quelle est la hauteur de vos épaules ? Est-ce symétrique ou asymétrique ? Par ailleurs, n’avez-vous pas remarqué que nous avons tendance à adopter toujours la même posture ? Une posture qui est la conséquence de nos apprentissages, de nos blessures, des sports que nous avons pratiqués, du cadre familial dans lequel nous avons évolué,… Ainsi, en cet instant notre posture et notre dynamique corporelle sont l’expression de notre passé. Ce qu’il y a de formidable dans ce constat c’est l’aspect évolutif ce mode de fonctionnement. Rien n’est figé, nous sommes à même d’évoluer car nous possédons tous une certaine variabilité posturale. Ainsi, debout, il nous est possible d’incliner notre buste vers la droite, la gauche, de lever une épaule, de l’abaisser, d’incliner légèrement le bassin, bref d’adopter une multitude de postures. Des postures qu’il est possible d’automatiser au fil du temps, et qui sont plus ou moins coûteuses énergétiquement, plus ou moins efficaces, selon la situation et les contraintes auxquelles nous sommes soumis.

Agir ou laisser faire le hasard

[…] De même, lors d’une séance de bondissement l’entraîneur n’hésite pas à corriger le jeune skieur qui se tient voûté ou dont le dos se voûte à chaque saut, car il sait que ce défaut de posture, cette absence de maintien et de tonicité diminue l’efficacité de la gestuelle. Il lui fait donc prendre conscience de sa posture et lui indique comment se tenir lors de la réalisation de l’exercice. Ces exigences techniques renforcent et calibrent indirectement par conséquence le système musculaire ‘’postural’’. Dans ce cas, sans forcément en avoir conscience, l’entraineur effectue un travail postural puisque son action in fine modèle l’organisation du corps. Il agit et ne laisse pas la place au hasard.

La gestion de la posture dans le mouvement

Plaçons-nous maintenant face à ces jeunes skieurs et analysons les différentes gestuelles et organisations du corps qu’ils développent à chaque bond. Certains, sous la contrainte, sont capables de maintenir leurs jambes dans l’axe tandis que d’autres ont les genoux et/ou les chevilles qui rentrent, le bassin qui s’incline, ou encore une perte d’horizontalité des épaules, etc. (fig.1).

[…]

Un ensemble de défauts qui est source de compensations et d’asymétries, qui limite les capacités d’un jeune skieur et qui charge inutilement certaines articulations. En ce sens que ces défauts d’empilement articulaire modifient la répartition de la pression/tension au niveau des articulations composant la jambe et notamment au sein du genou. Sans action volontaire, le skieur reproduira et entretiendra cette dynamique, celle-ci n’évoluant qu’au hasard de ses entrainements et de son quotidien. Retenez que le corps est capable de fonctionner en présentant dans sa gestuelle et sa posture de nombreuses imperfections et pourtant sembler ‘’performer’’. Cette capacité de compensation est une force et une faiblesse. Une force car elle limite/atténue pour un temps l’impact architectural de nos déséquilibres, mais une faiblesse car elle peut nous amener à fonctionner à la limite de la physiologie articulaire.

Cependant il ne suffit pas de demander au skieur lors des séances de préparation physique d’orienter correctement le genou, encore faut-il cibler et mobiliser l’articulation responsable de ce positionnement (fig.1, Axe EAD). Pour cela approfondissons, autant que nous le permet un article, le fonctionnement de la jambe et évaluons son impact sur l’organisme et la pratique du ski.

Vers plus de complexité

Tout le monde a entendu parler des pieds pronateurs ou supinateurs, les marques de chaussure de running allant jusqu’à proposer des modèles différents selon que l’on soit l’un ou l’autre, nous donnant une impression d’irréversibilité du phénomène. Tu es pronateur et tu le resteras… Ces chaussures ‘’tentent’’ seulement de pallier au problème et n’apportent pas de réelles solutions. Pourtant ce n’est qu’un simple défaut d’orientation et de maintien du pied par rapport à la jambe, au même titre qu’un tennisman orienterait mal son poignet ou ne serait pas en mesure de le tenir lors d’un coup droit. En dehors de toutes pathologies, la forme du pied dépend de la façon dont on le pose, c’est-à-dire de son orientation dans le plan horizontal par rapport à la jambe[1] ; le pied n’est pas un bloc rigide, sa forme évolue instantanément et dans des proportions importantes comme en témoigne cette vidéo ( http://bit.ly/1mZTw42 ).

[…]

Défaut d’orientation du pied et pratique du ski alpin

L’orientation du pied dans le plan horizontal par rapport au bassin dépend de l’articulation de la hanche, du genou et de la sous-talienne. Cependant les mouvements d’inversion/éversion du pied (articulation sous-talienne) sont bloqués dans la chaussure de ski. Ainsi, le skieur qui présente un défaut d’orientation du pied par rapport à la jambe, nommé couramment pied pronateur ou supinateur, enfile sa chaussure avec ce défaut et surtout skie avec, ce qui n’est pas sans conséquence.

[…]

Même s’il semble évident que le ski alpin emploie d’une manière très particulière les ressources biomécaniques du corps humain, il n’est pas inutile de souligner qu’elles diffèrent fortement de la marche et de la course en raison du matériel que nécessite sa pratique (chaussures de ski et skis) et des blocages articulaires qu’elle induit. Ainsi, comme nous l’avons vu, un défaut d’orientation du pied (pronateur/supinateur) aura davantage de répercussion dans la pratique du ski alpin

Corps, gestes, postures et automatismes sont intimement liés, pris dans une boucle récursive qui, par essence, évolue sans cesse. Une approche qui commence par une conceptualisation plus précise du fonctionnement de notre corps, suivies d’un travail posturo-dynamique pour permettre au skieur dans ce cas de reprendre tout simplement le contrôle de l’orientation de ses pieds par rapport à la jambe.

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Pour aller plus loin
e-learning – Instabilités de la cheville, approche fonctionnelle
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[1] La forme du pied dépend également du degré d’Empilement Articulaire (EAD) de la jambe et de la forme du terrain (présence ou non de dévers)