Travaillez votre foulée

Bien-être et santé #329 Mars 2016
Entretien avec Frédéric Brigaud réalisé par Clarisse Nénard / Unrated version

La course à pied est un geste technique qui peut être plus ou moins bien effectué, plus ou moins efficient, et plus ou moins impactant. Que vous soyez un joggeur du dimanche ou un adepte de l’asphalte, votre démarche n’est pas quelque chose de figée.

La course à pied est un véritable phénomène de société. Selon une étude de la Fédération Française d’Athlétisme parue en 2014, 20% des français pratiquent le running, soit environ 9,5 millions de personnes. Des chiffres en constante hausse. Après quoi courent-ils ? 58% des pratiquants usent leurs baskets sur le bitume pour être en bonne santé et améliorer leur condition physique. Il faut dire que ce sport est l’un des plus bénéfiques pour l’organisme. Côté cardio-vasculaire, les bienfaits sont multiples. Bien dosé, il améliore les capacités cardio-respiratoires. Côté ligne, il sculpte la silhouette, redessine les mollets, les quadriceps (le devant des cuisses), les ischio-jambiers (l’arrière des cuisses) et remodèle les fessiers. Grâce aux mouvements des bras, le haut du corps est également sollicité. La taille s’affine, les abdominaux se dessinent… Au bout d’une vingtaine de minutes d’effort modéré et prolongé, il améliore la sécrétion d’endorphines, les fameuses hormones du bonheur.

Sommes-nous vraiment faits pour courir ?

Contrairement à ce que nous croyons, il ne suffit pas d’acheter une bonne paire de baskets. « Si l’Homme est adapté à la course à pied, courir est un geste technique qui nécessite d’être appris. » Pour Frédéric Brigaud, ostéopathe DO, consultant en biomécanique humaine et sportive, également auteur du Guide de la foulée aux éditions Désiris, notre manière de courir est avant tout l’expression de notre passé. « En course à pied on peut produire mille et une gestuelles. Celles-ci dépendent de l’enfance, des traumatismes subis, des entraînements, des différentes disciplines sportives pratiquées, des pathologies… Ce qui nous détermine, c’est notre architecture et ce qu’elle nous permet de faire. En raison de notre possibilité à produire mille et une stratégies pour répondre à une action, rien ne nous détermine à courir correctement spontanément. »Plusieurs techniques existent : en attaquant le sol avec le talon, l’avant-pied ou à plat (assez rare). La différence réside entre autres dans l’impact généré à chaque foulée.« Courir étant une chute à chaque pas, mieux vaut l’amortir. La prise avant-pied va le permettre de manière efficace. » Pieds nuseffectuez quelques bonds sur place, qui spontanément s’effectuent avant-pied, et réceptionnez-vous sur les talons, vous allez sentir un impact brutal. Rien que d’y penser, vous n’allez pas avoir envie de le faire. Faites également l’expérience de courir pieds nus sur le goudron. Rapidement douloureux, vous attaquerez le sol différemment au bout de 100m. Les fabricants ne cessant d’innover notamment en matière d’amorti, nous pouvons avoir une prise d’appui talon, et réaliser ces mêmes tests en ressentant nettement moins l’impact. Cependant, attention! « Même si le pied semble protégé, il y a toujours une onde de choc qui se propage dans l’ensemble de l’organisme. »

Quelle technique de prise d’appui adopter ?

Instinctivement, il n’y a rien qui nous prédispose à courir avant-pied ou talon. « En fonction de la prise d’appui employée, vous n’utilisez pas le corps de la même façon. Avec une prise avant-pied et une posture antérieure, les talons sont légèrement décollés. Vous êtes alors plus réactif. A chaque foulée, vous amortissez ‘’la chute’’ en contractant le muscle du mollet, utilisant davantage la cheville. De plus, en contrôlant la descente du talon jusqu’à ce qu’il vienne effleurer le sol, la décélération est plus faible et de fait les contraintes que l’on applique au corps également. D’où l’importance de la part technique du geste dans la course à pied ! Cependant, avec une prise d’appui talon, si la force de réaction au sol est équivalente à 2,2 fois le poids de votre corps, l’avant-pied supporte dans ce cas seulement 1,8 fois le poids du corps puisque le talon aura amorti une certaine quantité de cette force. Si vous êtes avant-pied, c’est 100% de la réaction au sol qui est supportée, c’est à dire 2,2 fois le poids du corps. Les contraintes sont supérieures à ce qu’il supporte habituellement. Il est donc essentiel d’avoir conscience qu’en passant d’une technique à l’autre, il faut laisser le temps à l’organisme de s’adapter, de se renforcer. Sinon, vous allez vous faire mal. »

Commencez par courir devant votre glace

Comme le tennis, la course à pied requiert un apprentissage technique. Ce n’est pas en courant à l’extérieur que l’on développe de la qualité dans sa gestuelle, mais chez soi sur place et pieds nus. « Face à un miroir, sans que personne ne vous regarde, vous pourrez vous concentrer sur la qualité de la prise d’appui, la descente du talon, et donc travailler tout l’aspect amortissement. Vous verrez si vous avez une épaule plus haute… Si le balancement des bras est correct. Si vous arrivez à produire une prise d’appui semblable à droite et à gauche. Si vous descendez le talon correctement jusqu’à ce qu’il vienne effleurer le sol. En développant ces sensations et perceptions, vous saurez ainsi une fois dehors quoi mettre en œuvre. » Autre paramètre pour partir du bon pied, courir lentement. « Si vous avez l’habitude de courir à 12 km/h, passez à 5km/h afin de laisser le temps à votre corps de se renforcer progressivement. Effectuez des sessions spécifiques, en alternant 1 minute de course avant-pied à 5km/h et 1 minute de marche. Faites-en pendant ¼ d’heure 20 minutes la première semaine par exemple. » L’important est de se potentialiser !

Les 5 conseils à suivre de Frédéric Brigaud,Ostéopathe DO et consultant en biomécanique humaine et sportive, concepteur des principes posturo-dynamiques d’ « Empilement Articulaire Dynamique » (EAD concept™) Auteur de plusieurs ouvrages sur la marche, la course et le pied

  • Demandez-vous pourquoi vous souhaitez courir. En fonction de votre objectif et de votre niveau de motivation, qu’êtes-vous prêt à mettre en œuvre
  • Prenez le temps de travailler votre technique. La gestuelle est un élément essentiel.
  • Soyez progressif. Mieux vaut commencer lentement en gardant toujours une gestuelle efficiente et la plus respectueuse possible de la physiologie articulaire que de chercher à faire un chrono.
  • Écoutez votre corps. Ce n’est pas parce que vous ne sentez rien que vous ne vous faites pas mal.
  • Ne choisissez pas n’importe quelle paire de baskets.
Pour aller plus loin :
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