Frédéric Brigaud.
Entretien – Prise d’appui avant-pied & Barefoot
MARS 2013 / BAREFOOTRUNNER
- En course à pieds, doit-on prendre en considération la gestuelle du corps dans son ensemble et pas uniquement les pieds et les jambes ?
- Doit-on y attacher encore plus d’importance quand on effectue la transition vers le minimalisme ?
- Est-ce réellement possible de courir sans faire de bruit ?
- Comment réduire les douleurs post efforts au niveau des mollets ?
- Est-ce qu’il existe des contre-indications à la course pieds nus si on a l’habitude de courir avec des orthèses et/ou des modèles anti-pronation / supination ?
- Est-ce que le pied peut corriger de lui-même une mauvaise prise d’appuis et/ou une mauvaise posture ?
Fred Brigaud / Signes particuliers : Barefooter. Il court essentiellement pieds nus ou en Vibram FiveFingers selon le lieu, la température et la propreté du sol… Mais surtout il fait courir les sportifs qu’il encadre pieds nus, du footballeur au skieur en passant par le karatéka, dans un souci de performance et de préservation.
Le dernier ouvrage de Frédéric Brigaud dédié à la course à pied nous aide à mieux appréhender l’importance de la posture, de comprendre les erreurs techniques couramment commises par les coureurs, depuis la prise d’appui jusqu’à l’orientation des bras ou encore celle de la hanche. La richesse des informations pourrait même en impressionner certains… Cet ouvrage est destiné aux professionnels du monde du sport, au monde médical, mais également aux passionnés de la course à pied compétiteurs ou amateurs grâce au double niveau de lecture voulu par l’auteur qui permet de retenir l’essentiel même si l’on n’a pas reçu de formation spécifique en biomécanique. Une nouvelle impulsion pour votre foulée !
En course à pieds, doit-on prendre en considération la gestuelle du corps dans son ensemble et pas uniquement les pieds et les jambes ?
Assurément ! Le corps est un tout où tous les éléments interagissent. En avoir conscience et savoir comment lier et mobiliser les différentes parties du corps est un réel atout ; source de préservation et de performance. Dans le cadre de la course à pied c’est dédier l’ensemble du corps pour un déplacement vers l’avant. Combien de coureurs n’emploient que leurs jambes pour courir négligeant le haut du corps ? Ils n’ont pas conscience que du fait qu’il est mal employé il les freine, les déséquilibre et impacte leur foulée. Le premier athlète complet, c’est-à-dire orchestrant l’ensemble de ses segments pour avancer, que j’ai pu observer dans la pratique de la course à pied et plus spécifiquement du Trail est Dawa Sherpa. Ce jour là, en 2009 aux Contamines, j’ai pu constater que pas un secteur de sa gestuelle n’était mal employé. Efficacité, aisance, fluidité, solidité et marge de manœuvre sont des mots qui caractérisent sa biomécanique, sa gestuelle. Chez lui la performance est une conséquence, pas un objectif. Donc oui, on doit prendre en considération le corps dans son ensemble si l’on souhaite être efficient ; l’interrelation bras, tronc, jambe a une action directe sur la foulée.
Doit-on y attacher encore plus d’importance quand on effectue la transition vers le minimalisme ?
Oublions si tu veux bien le terme de minimalisme, on croirait un article de mode, voire une secte… La chaussure avec amorti permet une prise d’appui talon (la subtilité est justement dans le terme « permettre », tout comme les prothèses d’Oscar Pistorius lui permettent de courir), la chaussure sans amorti ne le permet pas. Donc la première question à se poser, me semble-t-il, est à quel type de prise d’appui notre organisme est-il le mieux adapté ? La réponse que je donne est la prise d’appui avant-pied. (cf. vidéo / CONFÉRENCE DE L’UTMB 2012, « BAREFOOT ET PRISE D’APPUI » PAR FRED BRIGAUD ). La transition est avant tout dans la technique de course. Nous possédons dans notre organisme les meilleurs des amortisseurs qui soient, les muscles ! Bien meilleurs que toutes les mousses ou gels que l’on peut introduire dans une chaussure. Cependant changer de technique de course, passer d’une prise d’appui talon à une prise d’appui avant-pied demande un apprentissage et un temps d’adaptation de notre système ligamentaire, tendineux, musculaire et osseux. Alors à l’heure du tout, tout de suite, cela fait grincer quelques dents…
Pour répondre à ta question car nous nous en sommes un peu éloignés, il est essentiel d’attacher de l’importance à une conception globale de la gestuelle incluant bras, tronc, jambes… Cet ensemble participe à la propulsion s’il est correctement orchestré mais pas seulement… Il faut profiter de cette transition pour l’inclure.
Est-ce réellement possible de courir sans faire de bruit ?
Sans aucun bruit, très difficile. Le bruit traduit l’importance de l’impact lors de la prise d’appui, c’est un bon indicateur de la qualité de votre prise d’appui. Courir en tapant des pieds c’est gaspiller de l’énergie inutilement. Les chaussures avec de fort amorti rendent très difficile la perception de celui-ci. Alors que l’amorti est un point clé de l’efficience, il détermine l’onde de choc qui se propage dans l’organisme sous tension et rentre en ligne de compte dans le rendement de votre foulée et la préservation.
Comment réduire les douleurs post efforts au niveau des mollets ?
En courant intelligemment ! Mieux vaut prévenir que guérir. Si vous avez des douleurs dans les mollets après avoir couru, c’est que vous avez dépassé vos capacités du moment. C’est malheureusement un classique qui peut aller jusqu’à la « déchirure » (même si le terme est impropre). Donc si vous êtes pressés, vous aurez mal aux mollets ! Apprenez à réguler vos efforts. Pour la première fois vous pouvez percevoir le temps d’adaptation du corps face à un entraînement, c’est merveilleux, non ?! On ne court plus après la montre ou une distance, mais pour faire évoluer notre organisme en lui laisser le temps de s’adapter… Et après, une fois que cette adaptation est effective, vous percevrez, pour ceux qui ont un bon ressenti corporel, une réponse élastique que vous n’aviez pas avant, quelque chose d’étonnant. De vrai kangourou !
Est-ce qu’il existe des contre-indications à la course pieds nus si on a l’habitude de courir avec des orthèses et/ou des modèles anti-pronation / supination ?
Vaste sujet où il faudrait donner une réponse individualisée. Ce qui est certain c’est qu’il existe des malformations, des déformations et/ou des pathologies qui nécessitent le port d’orthèse et qui de ce fait ne permettent pas de courir les pieds nus. Un professionnel devrait être à même de le déterminer. Lecteur, si vous êtes concernés, posez lui directement la question.
Cependant, après avis, si une « pronation » ou une « supination », bien que je n’aime pas employer cette terminologie qui s’attribue à la main, n’est pas la conséquence de pathologies, de malformations ou autres, mais provient d’un réel défaut de prise d’appui, la course pieds nus est possible. Il faudra alors que la personne apprenne à prendre appui afin de corriger ses défauts. Recentrons la discussion, et n’oublions pas que la course pieds nus c’est avant tout une prise d’appui avant-pied. Alors je pose la question suivante pour lancer le débat, quelle action a une semelle lorsque vous prenez un appui avant-pied ?
Est-ce que le pied peut corriger de lui-même une mauvaise prise d’appuis et/ou une mauvaise posture ?
La réponse est non, le pied n’est pas auto-correcteur et il ne corrige pas une mauvaise prise d’appui, par contre lui (le pied) et le reste du corps compenseront les répercussions de cette mauvaise prise d’appui. Et qui dit compensation, dit baisse de rendement, augmentation de la dépense énergétique, et un empilement articulaire dynamique (EAD) moins optimal. Si vous avez un défaut de prise d’appui vous risquez de le garder longtemps, sauf si vos gestes du quotidien ou d’autres pratiques sportives, voire des traumatismes, vous amènent à changer vos appuis, mais c’est alors un peu « au petit bonheur la chance ». La prise d’appui, cela s’apprend et ce n’est qu’un aspect de la biomécanique de la course à pied. Je reprendrai cette phrase tirée de l’ouvrage et qui résume ce que nous nous sommes dit jusqu’à présent « Le corps n’a pas de conscience on doit penser pour lui » et pour terminer je citerai Henri Laborit car il en va de même pour la biomécanique : « Tant que l’on a ignoré les lois de la gravitation, l’homme a cru qu’il pouvait être libre de voler. Mais comme Icare, il s’est écrasé au sol. Ou bien encore ignorant qu’il avait la possibilité de voler, il ne savait être privé d’une liberté qui n’existait pas pour lui. Lorsque les lois de la gravitation ont été connues, l’homme a pu aller sur la lune. Ce faisant, il ne s’est pas libéré des lois de la gravitation mais il a pu les utiliser à son avantage. » [H.Laborit, Eloge de la fuite, P37, Gallimard, 1976]
Pour aller plus loin :
- Tester et passer à une foulée avant-pied !
Plan d’entrainement simplifié
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